Quelle histoire se cache derrière votre nom de scène ?
Taïna signifie “secret” en russe et fait référence à mon côté mystérieux. Les Bermudes sont des îles anglaises, c’est un clin d’œil à mes origines britanniques.
Quelle est votre histoire avec la danse ?
Je suis née à Londres. J’ai commencé la danse classique, moderne et les claquettes à trois ans. Les comédies musicales font partie de la culture anglaise et ma mère m’y emmenait très souvent : j’ai tout de suite su que je voulais faire ce métier. Néanmoins, sur les conseils de mes parents, j’ai suivi un cursus scolaire classique jusqu’à mes dix-huit ans, en continuant la danse à côté. J’ai fait ensuite une école de comédie musicale pendant trois ans. Lors de ma dernière année, je suis venue en voyage à Paris et une copine m’a emmenée voir le spectacle du Crazy Horse. Là, c’était pour moi une évidence que ma place était parmi ces danseuses. Ce spectacle mettait en valeur le corps de la femme, dans toute sa splendeur. Depuis la puberté, j’avais des formes très féminines, les hanches larges, une taille fine, une poitrine généreuse, ce qui, me semblait-il, ne correspondait pas aux critères recherchés dans le monde de la danse. Voir ce spectacle m’a fait réaliser que je pouvais non seulement accepter mon corps en tant que danseuse aussi bien qu’en tant que femme, mais en plus que je pouvais revendiquer sa singularité et l’ériger au summum du glamour. Cette idée-là m’a plu immédiatement, et elle a été un moteur dans ma vie. Entrer au Crazy Horse est devenu mon objectif numéro un. J’ai été retenue lors du troisième casting, c’est-à-dire trois ans plus tard. Entre temps, j’ai passé mon diplôme de professeure de danse et fait mes premières expériences sur des tournages de clips, des plateaux télé ou encore des festivals. J’ai donc été embauchée en avril 2011. Six mois après, je suis partie en tournée et depuis, je parcours le monde entier…
En tant que femme et danseuse, quel est votre rapport à votre corps ?
Le sujet du rapport au corps est central dans ma vie. J’ai envie de le chérir et de le mettre en valeur. Le Crazy Horse, grâce à tous ses artifices de scène, nous procure la sensation agréable que notre corps est beau, mérite d’être aimé et nous donne confiance en nous. J’ai envie de transmettre ce sentiment à toutes les femmes, c’est pourquoi j’ai créé un cours de confiance en soi. Je leur apprends par des techniques de danse, de respiration, de positionnement et du dialogue à valoriser leurs points forts et accepter leurs points faibles. Parfois il suffit juste d’un déhanché ou d’un port de tête pour avoir le déclic. En cours particulier, je me rends compte que ce jugement pas toujours favorable des femmes sur leur corps vient d’un événement de leur vie, plus ou moins traumatisant comme une grossesse, la puberté, un divorce, un attouchement… Les réseaux sociaux et les médias peuvent être aussi dévastateurs en véhiculant l’idée que les physiques doivent répondre à une mode ou une uniformisation. C’est important pour les enfants de grandir avec des références multiples dans la société afin de ne pas se sentir exclus lorsqu’ils constateront leurs propres différences.
Quelle serait votre définition de la féminité ?
Il n’y a pas qu’une définition de la féminité, il y en a mille. C’est important de cultiver sa différence : s’assumer, c’est le premier pas vers l’épanouissement.
Qu’est-ce qui, au quotidien, continue de vous faire vibrer quand vous entrez au Crazy Horse ?
Lorsque je passe la porte, je suis toujours joyeuse de retrouver mes collègues, qui sont comme mes sœurs. J’ai toujours été entourée de beaucoup de femmes dans ma vie et j’aime leur compagnie. J’aime les odeurs de la scène aussi, voir des équipes différentes chaque soir et sentir l’ambiance qui varie. Et j’aime danser sur cette scène pour inspirer les femmes. Depuis onze ans, je vois de plus en plus de femmes venir voir le spectacle et il y a un échange particulièrement touchant et spontané avec ce public féminin.
Vos cours de comédie musicale ont-ils été un atout pour danser au Crazy Horse ?
Bien sûr ! Chaque tableau du Crazy Horse nécessite un jeu de scène. Mais l’anecdote que je retiens c’est qu’à l’école de comédie musicale, l’une de nos professeures nous forçait à apprendre des chansons dans toutes les langues pour nous préparer, disait-elle, à travailler n’importe où. À l’époque, je trouvais ça ridicule. Aujourd’hui que je fais du playback dans toutes les langues et que je voyage partout dans le monde, j’aimerais la remercier.
Quel est votre meilleur souvenir au Crazy Horse ?
Mon meilleur souvenir est lorsque nous avons dansé God Save Our Bareskin en tournée à Londres devant les vrais Queen’s Guards qui nous ont offert une magistrale standing ovation ! Pour moi qui suis anglaise, c’était vraiment un moment spécial et inoubliable !
Vous êtes danseuse au Crazy Horse. Avez-vous un rêve encore plus crazy à réaliser ?
Je suis l’aînée de quatre frères, deux paires de jumeaux. Les deux plus jeunes sont danseurs classiques. Mon rêve serait de danser un jour sur scène avec eux.
Quel tableau du show Totally Crazy! vous émerveille le plus ?
Undress to Kill a été créé pour Dita Von Teese. Ce n’est pas un numéro dansé, mais il nécessite une présence scénique absolue et une précision millimétrée pour se placer correctement en fonction des projections lumineuses. C’est le solo dans lequel je me sens la plus forte, la plus belle, la plus Crazy.
Découvrez Taina de Bermudes en vidéo :
Photos :Paul-Henri Pesquet, Riccardo Tinelli
Vidéo : Paul-Henri Pesquet