Quelle histoire se cache derrière votre nom de scène ?
Paz signifie « Paix » en espagnol. Quant au Picaflor, c’est un colibri. Ce petit oiseau exotique aux couleurs de lagon me rappelle mon pays natal, la République Dominicaine, et j’en porte d’ailleurs un tatouage.
Quelle est votre histoire avec la danse ?
Mon histoire avec la danse a commencé très tard ! J’ai grandi en Guyane française entourée de frères et sous l’autorité d’un beau-père militaire. La danse n’était pas au programme dans ma famille. En revanche, je suis allée loin dans le milieu du handball mais une mauvaise fracture a stoppé net ma carrière professionnelle.
À dix-huit ans, j’étais avide de découvrir le monde, pressée de me dégager de mon carcan familial très strict. Pour mon premier voyage, j’ai choisi le Brésil et ce fut une révélation à tous points de vue. J’ai eu l’impression de naître à nouveau. Là-bas, la danse et la musique sont des piliers de leur culture : elles sont une source de joie et un moyen populaire de s’exprimer et de partager, tout simplement. J’ai toujours gardé ça en moi par la suite.
Après quelques pérégrinations, je me suis installée à Tours, en France. C’est là que la danse est entrée non plus seulement dans ma vie, mais dans mon corps ! Je me suis rendue à une audition pour devenir danseuse dans un cabaret familial. Je n’avais aucune formation mais je n’avais rien à perdre. La danseuse principale, une Brésilienne justement, m’a annoncé qu’elle me donnait une semaine pour maîtriser tous les pas de samba à la perfection, sans ça, inutile de revenir. Je suis rentrée chez moi, j’ai ouvert YouTube et je me suis lancée ! Sept jours plus tard, j’étais engagée. Peu à peu, j’ai gravi tous les échelons et me suis épanouie au sein de cette troupe qui était devenue comme une deuxième famille. Parallèlement, j’ai commencé à confectionner et vendre des costumes de samba et j’ai créé un cours de Zumba avec mes deux complices du cabaret. Tout marchait à merveille mais au bout de dix ans, j’avais envie d’élargir mon horizon.
Après avoir vu un reportage sur le Crazy Horse, j’ai commencé à envoyer des candidatures spontanées.
Entre temps, je m’étais installée à Paris où je multipliais les expériences autour de la danse et du fitness : je donnais des cours et organisais des évènements spectaculaires avec ma troupe de danse brésilienne. Quatre années ont passé et je suis retombée sur une annonce du Crazy Horse. Cette fois c’était pour moi ! Je me suis présentée à l’audition et j’ai été prise. J’étais stupéfaite d’en être arrivée là, moi qui n’étais pas danseuse de formation !
Qu’est-ce qui vous rend particulièrement fière en tant que danseuse du Crazy Horse ?
C’est justement le fait d’être danseuse au Crazy Horse ! Mon parcours est tellement atypique que je n’aurais jamais pu imaginer être un jour Crazy Girl. D’ailleurs, je ne réalise toujours pas aujourd’hui. Parfois, quand je me couche le soir après le show, je me dis « encore une journée au Crazy, c’est incroyable ce qu’il m’arrive ».
Vous aviez déjà fait dix ans de cabaret, qu’est ce qui était nouveau pour vous au Crazy Horse ?
Je suis latine, je sais me mouvoir naturellement de manière sensuelle. Mais au Crazy Horse, la séduction est poussée à son paroxysme. Elle doit imprégner chaque millimètre de notre corps, chacun de nos minuscules mouvements. Cela demande une concentration immense. Pour moi, l’effort mental est aussi exigeant que l’effort physique.
Etes-vous la même femme sur la scène du Crazy Horse et dans la vie ?
Pas du tout ! En fait, je suis un peu comme la samba, cette danse a une double personnalité : le haut du corps ne bouge absolument pas alors que les jambes sont dans une sorte de transe. Moi aussi j’ai deux facettes. Dès qu’il s’agit de danser, je m’anime, j’ai l’impression que ça rayonne en moi, et sur scène… j’explose ! Mais en dehors de ça, je suis plutôt calme, ordonnée et précautionneuse.
Qu’est-ce qui, au quotidien, continue de vous faire vibrer quand vous entrez au Crazy Horse ?
C’est la promesse de vivre quelque chose de différent chaque soir. Quand je passe la porte du cabaret, je sais que je vais ressentir des émotions différentes de la veille, en fonction des filles présentes, du public et de ma propre énergie.
Avez-vous un petit rituel personnel avant d’entrer en scène ?
Avant d’entrer sur scène, je me frotte les mains et je touche le sol. D’un côté, ça me donne l’impression de me débarrasser de mon trac. D’un autre, c’est un geste un peu superstitieux, comme si en touchant le sol de la scène du Crazy Horse, je touchais un objet qui me protège et me rappelle ma chance de danser dans cet endroit mythique.
Quel tableau du show Totally Crazy! vous émerveille le plus ?
Scanner est un numéro particulier pour moi. J’ai la sensation qu’il retrace toute mon histoire. On débute comme persécutées, emprisonnées entre 2 barres et puis on se déchaîne et on se délivre de tout. Je me suis battue pendant très longtemps pour me libérer en tant que femme et m’ouvrir au monde. Symboliquement, je ne pouvais pas rêver mieux que le Crazy Horse pour finir ce cheminement en beauté, à mille lieux de ce à quoi j’étais destinée, petite.
Photos: Paul-Henri Pesquet, Michel Dierickx