Tina Tobago est danseuse au Crazy Horse… et infirmière de bloc opératoire. Rencontre avec une femme dont l’énergie et le charisme sont autant de forces pour une double vie totalement assumée.
Comment et pourquoi avez-vous intégré la prestigieuse troupe des Crazy Girls ?
C’est à la fois un rêve et le fruit du hasard. J’avais douze ou treize ans quand je suis tombée sur une vidéo du Crazy Horse à la télévision, diffusée pour Noël. J’ai tout de suite été fascinée par la manière dont les danseuses bougeaient, ce qu’elles dégageaient… A cet âge-là, j’étais très sportive, 15 heures par semaine de gymnastique rythmique et je faisais tout comme les garçons ! Ma féminité était plutôt à l’intérieur de moi, et j’ai su, en voyant cette vidéo, qu’un jour je voudrai devenir une femme comme celles du Crazy Horse.
A 21 ans, j’ai partagé ce rêve avec mon compagnon, mais je n’y croyais pas. Pour moi, être une Crazy Girls était inaccessible, car j’étais gymnaste et elles étaient plutôt issues d’écoles de danse, de spectacle. Il a tout de même envoyé ma candidature, pour laquelle il n’y avait pas eu de suite, j’étais déçue mais pas surprise. Quelques années plus tard, j’ai retenté ma chance, et là j’ai pu passer une audition. Entre temps, je m’y étais préparée, j’ai beaucoup dansé… et j’ai intégré la troupe des Crazy Girls en avril 2017 !
Infirmière et Crazy Girl, comment gérez-vous votre double vie ?
Je suis infirmière de bloc opératoire, ce qui me permet de m’organiser assez facilement. J’ai notamment mes week-ends et je fais des gardes trois fois par semaine, avec quatre jours de libre d’affilée. Au début j’étais vacataire, donc c’était facile de prendre des missions ou pas, mais maintenant je suis en CDI donc il faut jongler davantage.
Mener ces deux vies de front est possible car j’aime être en mouvement : au bloc, c’est mon cerveau qui est sollicité, et au Crazy Horse c’est mon corps qui bouge et qui s’exprime. C’est très complémentaire et cela me va parfaitement.
Quel est votre tableau préféré et pourquoi ?
J’adore Jungle Fever et Lay Laser Lay. Le second était celui que j’avais vu dans la vidéo de Noël quand j’avais treize ans, et c’était aussi mon premier solo sur la scène du Crazy Horse. Je les aime pour leur côté un peu « sauvage », mais aussi pour leur sensualité. En réalité, je m’imagine peu incarner une femme pétillante et souriante, j’ai besoin d’énergie un peu sombre pour m’exprimer dans la danse, et dans ces tableaux je peux l’utiliser. La sensibilité et la fragilité qui se dégagent du tableau But I’m a good girl me séduisent énormément mais ce n’est pas forcément une évidence pour moi de les interpréter.
Qu’est ce qui qualifie selon vous la Crazy Girl ?
Devenir une Crazy Girl prend du temps, et on ne sait pas au départ quelle Crazy Girl on va devenir. D’ailleurs cette incarnation n’est pas figée, elle évolue avec les années. Je dirais qu’une Crazy Girl, pour moi, c’est une femme assurée et assumée, sensible et sensuelle. Elle se connaît suffisamment bien pour exprimer sa féminité, en jouer, dégager de l’émotion et la partager.
J’ai deux modèles de femmes dans ma vie qui m’ont inspirée. Ma mère donnait des cours de danse, et ma grand-mère était cadre infirmier. Aujourd’hui, je suis fière de les incarner toutes les deux dans ma double vie de Crazy Girl et d’infirmière !